Propriété menacée, marché immobilier asphyxié : le piège de la législation trop favorable aux locataires

Avocat immobilier : protégez vos investissements immobiliers avec un expert

En France, un propriétaire victime de loyers impayés ou d’un squat attend plus d’un an pour retrouver son bien. Un déséquilibre juridique qui décourage l’investissement locatif privé, fragilise le droit fondamental de propriété et fait augmenter les loyers au détriment des plus faibles, censés être protégés. Etat des lieux d’une absurdité française.

par Séverine Rosenberg, avocat au Barreau de Paris

En France, un propriétaire victime de loyers impayés ou d’un squat attend plus d’un an pour retrouver son bien. Un déséquilibre juridique qui décourage l’investissement locatif privé, fragilise le droit fondamental de propriété et fait augmenter les loyers au détriment des plus faibles, censés être protégés. Etat des lieux d’une absurdité française.

Le locataire, un débiteur intouchable

En théorie, un bail locatif est un contrat synallagmatique : le bailleur fournit un logement, le locataire s’engage à payer le loyer. En pratique, dès que les loyers cessent d’être versés, les leviers du propriétaire sont réduits : l’assignation au tribunal est lente, une procédure d’expulsion prend en moyenne 18 à 24 mois, les délais de paiement accordés par les juges sont systématiquement généreux, allant jusqu'à une annulation complète de toute dette, et la trêve hivernale suspend l’exécution forcée pendant cinq mois après la décision rendue.

Le squat : violence légale contre les propriétaires

Le cas du squat est encore plus emblématique de ce désarmement juridique. En l’état du droit, bien qu’un logement soit occupé illégalement, le propriétaire doit engager à ses frais une procédure judiciaire. Même lorsqu’un jugement est obtenu, la force publique ne procède à l’expulsion qu’après un an d’attente voire parfois en pratique plusieurs années. Le squat est un délit, mais la réponse de l’État est souvent plus lente que l’infraction. La loi du 27 juillet 2023 vise à accélérer les délais de la procédure dans ce type de cas notamment en supprimant la trêve hivernale pour les squatters mais cela demeure insuffisant.

Une politique publique contre-productive : disparition de l’offre et précarité accrue pour les plus faibles

Ce déséquilibre juridique n’est pas seulement injuste et néfaste pour le propriétaire, il nuit également aux locataires et aux plus faibles. Il décourage l’offre de logements sur le marché privé, alimente la pénurie locative dans les zones tendues. Alors que la France a une démographie dynamique et donc un besoin fort de logements, de nombreux bailleurs préfèrent aujourd’hui laisser leur bien vacant plutôt que d’exposer leur patrimoine à des mois de procédures coûteuses.

Les données sont édifiantes : en Île-de-France, près de 400 000 logements sont vacants (source INSEE en 2021). De plus, contrairement à ce que disent les médias bien-pensants, les propriétaires sont à 97 % des logements locatifs privés appartenant à des particuliers. La plupart n’en possèdent qu’un seul. On est donc très loin du schéma où le méchant capitaliste s’enrichirait sur le dos du pauvre locataire.

La politique ultra-protectrice de la veuve et de l’orphelin qui ne l’est que rarement en pratique, envers les locataires les plus précaires finit par produire l’effet inverse : le marché locatif se contracte, la sélectivité des bailleurs augmente fortement, la rotation du parc HLM est quasi-inexistante, et les plus fragiles en sont encore les premières victimes.

Conséquences économiques

Surtout cette disparition de l’offre fait augmenter les loyers, puisque la loi économique invariable de l’offre et la demande ne peut être changée par le législateur, totalement inculte économiquement et peureux politiquement.

Par exemple, il est beaucoup plus facile de se loger à Berlin qu’à Paris. Pourtant, Berlin n’est pas une ville ultra-libérale, mais l’offre et la demande s’ajustent naturellement. Le résultat : le loyer de Berlin est plus de deux fois moins cher qu’à Paris (loyer de 14 € / m² à Berlin comparé à 31 € / m² à Paris, sources : seloger, immowelt).

A Berlin, le marché immobilier locatif fonctionne pour trouver un prix d’équilibre bénéfique à la fois au propriétaire et au locataire.

Une autre conséquence du dysfonctionnement du marché parisien est l’augmentation de l’offre de meublés touristiques, dits « AirBnb », pour contourner le plafonnement des loyers, ce qui réduit encore plus l’offre disponible de la location nue.

Ce qu’il faut réformer : une sécurité juridique accrue sanctionnant le débiteur

Un rééquilibrage est non seulement nécessaire, il est urgent. En effet, le locataire doit être certain que, s’il n’est pas à jour de ses loyers ou manque à ses obligations de locataire, il sera expulsé de manière certaine et rapide, avec en sus le remboursement des frais d’avocat du propriétaire à sa charge. Dura lex sed lex. Voici quelques propositions concrètes pour restaurer la sécurité des contrats dans un cadre libéral, mettre fin au laisser-aller du débiteur et in fine responsabiliser les parties prenantes :

  • Procédures accélérées pour les impayés : création de juridictions spécialisées pour statuer sous 90 jours sur les litiges locatifs.
  • En cas de défaut constaté par la précédente juridiction, garantie d’expulsion sous six mois maximum, appel compris, après la première mise en demeure pour défaut de paiement du loyer, même partiel, supérieur à 3% du loyer mensuel.
  • Garantie d’exécution du remboursement des frais d’avocats (art 700 cpc).

La protection des locataires n’implique pas le sacrifice des propriétaires. Un marché locatif effectif repose sur la confiance, la prévisibilité et le respect mutuel des engagements. Les acteurs privés, avec les bonnes incitations, sauront combler les déséquilibres du marché et maximiser l’utilité du logement.

A condition que la puissance publique revienne dans son lit naturel : celui du régulateur qui fixe des règles saines et simples, permettant une économie de marché, et surtout les fait appliquer. Car une loi sans mise en œuvre effective est inutile.

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